• Ma béhème

    Ma béhème  (hommage à Rimbaud)
    Renaud Richard


    Un clair matin d’été, j’emmenais ma compagne
    Goûter à la joie simple d’une étreinte rurale
    Tapis entre les arbres ou au bord d’un canal
    Se retrouver, nous deux, perdus dans la campagne

    Des racleurs de bitume, projectiles inconscients
    Juchés sur des gadgets dégobillant leurs watts
    Eclaboussèrent un temps la quiétude sylvestre
    Du son du complément de leur virilité

    Moi, je marchais dans l’herbe, guettant dans les violettes
    Les effets personnels que ma très chère amante
    - Reposant dans les bois fatiguée et repue-
    Avait éparpillé au long de nos ébats

    Ayant pu rassembler un nombre conséquent
    De vis, écrous, rondelles et goupilles diverses
    Je rhabillais la belle et d’un coup de jarret
    Réchauffant ses ardeurs, l’enfourchais ardemment
    Pour qu’elle m’emporte enfin vers la septième panne

    Une brise estivale se faufilait gaiement
    Par différents accrocs sciemment distribués
    Sur ma vieille combarde par des gamelles honteuses
    Entre sortie de rade et insidieux graviers

    Eh oui très cher Arthur !
    Tu n’avais que les poings dans tes poches crevées
    Moi, dans mon cuir râpé, j’y rentre tout entier
    Mais je n’aurais jamais cette puissance brute
    Qui sait fendre la gangue pour en tirer la gemme
    Alors, respectueusement je relis “ma bohème“
    Et je roule tranquille sur ma vieille béhème.